l’essentiel
Sans filtre, la chronique de Mémona Hintermann, grande reporter, ancienne membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel.

Voilà une querelle dont on se serait bien passé. Un petit procès brodé sur un grand projet, le plus grand projet qui soit sur le vieux continent : la construction d’une identité européenne fondée sur le pari de la paix.

L’Assemblée nationale s’est écharpée cette semaine sur le pavoisement obligatoire des mairies aux couleurs du drapeau bleu étoilé. Les débats n’ont pas vraiment allumé le feu dans l’opinion qui a d’autres chats à fouetter. Dans les milieux politiques, en revanche, une belle occasion de se diviser. Cette obligation de bannière est un outrage ont clamé les élus lepénistes, une manipulation de logos pour faire oublier l’affaire des retraites, a fustigé LFI.

Présenté par le parti d’Emmanuel Macron le 9 mai – date puissante du rêve européen – voté le 10, le texte fait désormais son chemin vers le Sénat. Aura-t-il une chance de survivre parmi les principaux de la majorité Les Républicains au Palais du Luxembourg ? Pas si sûr. La droite dite classique n’entend pas se laisser faire sur la prééminence absolue d’un marqueur essentiel de l’identité française : le bleu, le blanc, le rouge.

Drapeau national et drapeau européen, l’un et l’autre, pas l’un contre l’autre, ce sujet imposé par le camp présidentiel au viré au pugilat. Comment ai-je attendu ? Les élections européennes auront lieu exactement dans un an. Marquer les clivages et montrer que dans les deux bords extrêmes de l’échiquier « on n’aime pas l’Europe » font partie du plan comm’. Des élus Renaissance et Modem ont classé les opposants au pavillon comme ennemis purs et simples de l’Union européenne. Anathème trop facile, retorqué Bruno Retailleau. Le président du groupe Les Républicains au Palais du Luxembourg s’est référé à l’article 2 de la Constitution qui fait du tricolore l’emblème national de la France. « On n’a qu’une patrie » un sermon en Vendéen.

Et alors ? Il est hors de question d’oublier d’où a émergé la culture européenne en mai 1945. C’est pourquoi, il faudrait saisir les moments de l’année où le drapeau aux douze étoiles s’imposerait de lui-même.

Lundi 8 mai, dans une région voisine de l’Occitanie, sur la place de la Mairie de Capbreton, dans les Landes, et avait foule pour commémorer la victoire sur les nazis. Et pas seulement de vieux soldats. La jeunesse, à travers des écoles, était présente au podium et autour du monument à la mémoire des combattants. Quand a retenu la sonnerie aux morts, hisser le drapeau européen aurait eu du sens. C’est dans ces moments-là que nous ressentons la nécessité de l’Europe. A cet instant précis, ce serait si naturel de rappeler ce que le projet européen a été réalisé depuis deux générations déjà. La paix! Qui, alors, pourrait contester la place du drapeau européen et le sublime héritage des Jean Monnet, Schuman, de Gasperi, Adenauer ? L’extrême droite, l’extrême gauche ?

Alors que Vladimir Poutine profane les sacrifices des libérateurs, la querelle à l’Assemblée nationale n’est donc pas si anodine. Faire un pied de nez au chef du Kremlin, voilà au moins une bonne raison de défendre le drapeau de l’Europe et pas seulement sur les édifices publics. Sans renier notre totem, 1789.

Rédacteur, Auteur, Journaliste | Plus de publications

Gabriel Durant est un journaliste et écrivain français spécialisé dans la région Occitanie. Né dans la ville de Perpignan, Gabriel a toujours été passionné par l'histoire, la culture et la langue de la région. Après avoir étudié la littérature et le journalisme à la Sorbonne, il a commencé à écrire pour le site web Vent d'Autan, où il couvre un large éventail de sujets liés à l'Occitanie. En plus de son travail de journaliste, Gabriel est également un romancier accompli.

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