Il y a souvent beaucoup de bruit autour du potentiel des projets de science citoyenne, mais cela reflète-t-il le battage médiatique ou la réalité ? Andrew Gaier et Julian Resasco ont étudié la contribution dans un article intitulé « L’ajout d’observations scientifiques communautaires aux archives du musée améliore-t-il la modélisation de la distribution d’une plante endémique rare ? » Publié dans Écosphère. Dans une rare perte pour la loi des titres de Betteridge, la réponse est « oui ».

Les scientifiques qui cherchent à comprendre et à protéger les espèces menacées développent souvent des modèles qui prédisent où une espèce est la plus susceptible de se trouver en fonction de facteurs tels que le climat, le terrain et l’habitat. Ces modèles de répartition des espèces nécessitent de grandes quantités de données sur les endroits où l’espèce a effectivement été observée. Construire des modèles précis peut être difficile pour les espèces rares avec des enregistrements d’observation limités.

Cependant, la montée en puissance des plateformes scientifiques citoyennes offre de nouvelles opportunités. Des applications et des sites Web comme iNaturalist permettent aux naturalistes amateurs de documenter les observations de plantes et d’animaux. Bien que souvent considérés comme de moindre qualité que les enquêtes professionnelles, ces dossiers scientifiques citoyens peuvent considérablement augmenter les données disponibles sur les espèces rares et menacées.

Telesonix jamesii. Image : Gaier & Resasco 2023.

Gaier & Resasco a étudié cette approche pour le Telesonix jamesii, James’s False Saxifrage, une plante rare de haute altitude avec peu d’observations documentées. C’est une petite saxifrage atteignant 20 cm de haut qui pousse dans les crevasses des montagnes Rocheuses du Colorado et du Nouveau-Mexique. Son histoire naturelle doit être mieux connue et il existe une certaine incertitude quant à sa répartition.

Le botaniste a développé cinq modèles différents pour prédire la distribution de la plante, y compris des modèles statistiques et des algorithmes d’apprentissage automatique. L’intégration des archives scientifiques citoyennes d’iNaturalist a doublé les données disponibles pour l’espèce.

Les chercheurs ont découvert qu’un modèle d’apprentissage automatique « forêt aléatoire », formé à la fois sur des données scientifiques professionnelles et citoyennes, fonctionnait le mieux, avec une précision de 98 % (mesurée par le score « aire sous la courbe »). Tous les meilleurs modèles s’appuyaient fortement sur des variables climatiques telles que la température moyenne et les précipitations pendant la saison de croissance, ce qui suggère que cette plante est à risque dans un climat qui se réchauffe.

La validation des modèles par rapport à des observations indépendantes a également montré les avantages des données de la science citoyenne. Les modèles basés uniquement sur les enregistrements professionnels des musées et des herbiers ont obtenu de moins bons résultats lorsqu’ils ont été comparés aux enregistrements iNaturalist que ceux qui incluaient des données iNaturalist pendant la formation. Gaier & Resasco écrivent dans leur article :

L’approche d’intégration des données présentée dans cette étude présente une grande utilité potentielle pour la conservation et la gestion des espèces rares. Nous avons montré que les données scientifiques communautaires peuvent être fiables et augmenter considérablement le nombre d’enregistrements utilisables exploités pour modéliser les distributions. Les archives du musée et les archives iNaturalist doivent être examinées pour déterminer la fiabilité taxonomique et de localisation. L’utilisation du modèle amélioré de données iNaturalist ne convient que légèrement. Le choix de l’algorithme de modélisation a montré plus de variation dans nos résultats que le choix de la source de données. Une grande partie des informations nécessaires pour modéliser avec précision T. jamesii distribution était déjà saisie dans les données de l’herbier. Nous supposons donc que ce cadre peut être plus utile pour une espèce avec plus d’observations iNaturalistes dans de nouveaux habitats. Il est important de considérer qu’il s’agit d’une étude spécifique à l’espèce, et une meilleure compréhension pourrait être obtenue grâce à une approche multi-espèces. Une prochaine étape potentielle serait d’évaluer comment cette approche d’intégration des données diffère entre les espèces affichant différents modèles de rareté (Rabinowitz, 1981). Malgré ces mises en garde, les informations obtenues à partir de nos projections de modèles peuvent aider à la conservation de T. jamesii pour soutenir les futures enquêtes ciblées (Williams et al., 2009), aider à identifier les populations les plus à risque et prédire comment les distributions pourraient être affectées par les futurs changements climatiques (Franklin, 2013).

Gaier & Résasco 2023

LIRE L’ARTICLE

Gaier, AG et Resasco, J. (2023) « L’ajout d’observations scientifiques communautaires aux archives des musées améliore-t-il la modélisation de la distribution d’une plante endémique rare ? » Écosphère, 14(3). Disponible sur : https://doi.org/10.1002/ecs2.4419.

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