Les fleurs bilatérales ont tendance à recevoir moins de pollen que les fleurs radiales, alors pourquoi une plante voudrait-elle une fleur bilatérale ?

De nombreuses fleurs ont un design radial qui se ressemble quel que soit l’angle sous lequel vous les approchez. Mais d’autres ont une symétrie bilatérale. Ils sont symétriques, mais avec des moitiés gauche et droite distinctes. Pourquoi cela devrait-il être? Les botanistes ont pensé qu’il s’agissait d’un moyen de sélectionner des pollinisateurs spécifiques, mais une étude de base de données réalisée par Nicolay da Cunha et Marcelo Aizen indique qu’il pourrait avoir pour origine un moyen d’empêcher l’autofécondation. Leurs résultats, publiés dans Floreont des implications pour comprendre la coévolution plantes-pollinisateurs.

Symétrie bilatérale (gauche) et radiale (droite).

Vous pouvez trouver la symétrie dans la nature sous de nombreuses formes différentes. Deux types de symétrie dans les fleurs sont la symétrie radiale (actinomorphe) et bilatérale (zygomorphe). Lors de l’étude des fleurs, les chercheurs ont découvert que la zygomorphie a évolué de manière répétée et indépendante dans divers ordres et familles. Pourquoi?

Une idée est que la symétrie des fleurs facilite la perception des animaux, mais les différentes symétries signifient que les pétales fournissent des informations différentes. Les pollinisateurs peuvent traiter les informations d’un seul pétale d’une fleur de forme radiale, car ils sont tous très nombreux. En revanche, une fleur zygomorphe nécessite que le pollinisateur traite les informations d’au moins la moitié de la fleur. Cette difficulté de reconnaissance est importante car elle permet un couplage plus précis entre la fleur et le pollinisateur. Tous les pollinisateurs ne peuvent pas être dérangés par l’effort supplémentaire pour apprendre ces fleurs, on peut donc s’attendre à ce que les fleurs bilatérales attirent davantage de pollinisateurs spécialisés.

En parcourant des rapports publiés précédemment, da Cunha & Aizen constatent que les fleurs bilatérales sont en effet plus spécialisées, avec moins d’espèces venant visiter. Ils peuvent également avoir une morphologie plus spécialisée afin que non seulement ils obtiennent du pollen sur le corps d’un pollinisateur, mais qu’ils puissent également cibler l’endroit du corps où il frappe. De cette façon, ils peuvent réduire le risque de ramasser du pollen qu’ils ne peuvent pas utiliser d’autres fleurs. Pour que cela soit efficace, cependant, les anthères et la stigmatisation doivent devenir actives à différents moments (connu sous le nom de dichogamie) pour éviter l’auto-interférence dans les fonctions sexuelles et réduire le transfert d’auto-pollen.

Les botanistes ont mené des études pour déterminer si la réception de pollen conspécifique diffère entre les espèces à fleurs zygomorphes et actinomorphes et pour déterminer si l’auto-compatibilité est plus souvent associée à la zygomorphie des fleurs. Les résultats de ces études suggèrent que la zygomorphie des fleurs pourrait être une adaptation avec des conséquences fonctionnelles pour éviter l’autofécondation, ce qui peut augmenter la forme physique des plantes femelles.

Récemment, un grand ensemble de données sur la production de pollen et le nombre d’ovules par fleur pour 1 392 espèces d’angiospermes pollinisées par des animaux a été publié par Cunha et al. (2022). Il comprend des informations sur la forme de croissance (herbacée versus ligneuse) et la taille des fleurs (plus grande dimension linéaire) pour pratiquement toutes les espèces et sur le système de compatibilité (auto-compatible versus auto-incompatible) pour plus de la moitié des espèces. Pour analyser plus en détail cet ensemble de données, ils ont recherché des articles rapportant des données sur la réception de pollen stigmatique, le nombre de grains de pollen conspécifiques sur le stigmate.

Pour tester l’effet de la symétrie des fleurs (actinomorphe versus zygomorphe) sur la production de pollen, le nombre d’ovules et la réception de pollen stigmatique, da Cunha & Aizen ont utilisé un cadre de modèle mixte linéaire généralisé phylogénétique (PGLMM). Ils ont également testé une incidence différentielle d’auto-compatibilité entre les espèces à fleurs zygomorphes à l’aide d’un modèle PGLMM.

da Cunha & Aizen soutiennent que leur analyse révèle que l’évolution d’une morphologie florale bilatérale est probablement intrinsèquement liée à l’évolution de la séparation temporelle entre la déhiscence de l’anthère et la réceptivité au stigmate. Cette séparation temporelle limite l’auto-interférence entre les fonctions mâles et femelles de la fleur. L’analyse phylogénétique d’une base de données comprenant 1458 espèces d’angiospermes d’astérides a trouvé des preuves d’une évolution corrélée entre la protandrie, un passage entre les formes mâles et femelles et la zygomorphie des fleurs. Si tel est le cas, alors le passage aux fleurs bilatérales commence par éviter l’autopollinisation, et la spécialisation des pollinisateurs se développe à partir de là.

Les preuves que nous avons recueillies jusqu’à présent indiquent que l’évolution de la zygomorphie a permis la relaxation et le désassemblage éventuel de mécanismes d’évitement de soi redondants comme l’auto-incompatibilité. Cependant, dans ce cas, la zygomorphie ne peut pas être considérée comme un trait isolé car l’évitement de soi nécessitera une intégration plus étroite entre la morphologie des fleurs et le développement échelonné des organes sexuels, non seulement au sein des fleurs mais aussi parmi les fleurs au sein des inflorescences, et même parmi les inflorescences au sein du même plante (Armbruster, 2022; Harder et al., 2019). En tout état de cause, nos résultats et nos perspectives nous ont permis d’approfondir la compréhension d’associations intrigantes entre traits reproducteurs comme celle rapportée ici entre zygomorphie et auto-compatibilité.

da Cunha & Aizen (2023)

LIRE L’ARTICLE

da Cunha, NL et Aizen, MA (2023) « La pollinisation réduite des fleurs bilatérales pourrait refléter l’évitement de l’auto-fécondation, » Flore, (152220), p. 152220. Disponible sur : https://doi.org/10.1016/j.flora.2023.152220.

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