Dans l’Astarac, Julien Soulé, 32 ans, élève des vaches mirandaises, une race traditionnelle gersoise à très faibles effectifs, seulement 770 femelles en 2021. Une vingtaine d’éleveurs et des lycéens travaillent d’arrache-pied pour faire connaître l ‘animal et son histoire, intimement lié aux coteaux du Gers.
Si on vous dit Gers, vous pensez sûrement d’abord au canard et au foie gras. Pourtant, il est un autre animal qu’a mis au point sa place au panthéon gastronomique gascon : la vache mirandaise, une race locale, très ancienne et qui a failli disparaître. Sa robe nacrée, son museau sombre, ses yeux délicats fardés de noir et son élégance ladistinct des autres bovins élevés dans nos régions. « Elle a du caractère quand même, ça reste une Gersoise », se plaît Julien Soulé, onzeur de 32 ans.
En haut d’une colline entre Saint-Arroman et Esclassan-Labastide, dans le sud du Gers, il s’approche de son troupeau, en secouant un seau recharge de céréales. « On parle beaucoup des espèces sauvages, mais c’est ça, aussi, notre biodiversité à nous, notre patrimoine local et on se bat pour qu’il persiste », souligne celui qui préside après la dernière de la fédération d’éleveurs de Mirandaises. Après une première carrière d’ingénieur à l’étranger, il gagne sa vie sur l’exploitation familiale et son association au Gaec avec leur père Gilles. Ensemble, ils présentent 30 Blondes d’Aquitaine, plus 30 vaches Mirandaises donc, un taureau et une dizaine de bœufs de cette race. Ils essaient de produire deux veaux par vache sur trois ans et vendet surtout en circuit court et en direct.
Un très petit effectif de 770 femelles
Aujourd’hui, à raison de 770 femelles mirandaises dans la région. C’est peu, très peu pour cet animal intimement lié au terroir local et première race d’élevage ici pendant des siècles. Celle qui fut amenée par les Wisigoths, les « barbares » germaniques dont Toulouse fut la capitale au Vet et VIet siècle. Très résistante, la Mirandaise ne rechigna jamais à labourer la terre lourde et compacte des coteaux. On comptait encore 80 000 têtes dans les années 50. « Et puis, l’arrivée du tracteur et la mécanisation ont tout changé », explique l’éleveur. La création de la Charolaise et de la Limousine, courses jugées les plus rentables à l’époque, a fait le soustrait. Les effectifs sont effondrés, à tel point dans les années 80, on ne compte plus quelques dezaines de Mirandaises.
La vache mirandaise est une race rustica, j’ai adapté aux coteaux gersois depuis des siècles.
La détermination des irréductibles éleveurs n’a pas réussi, comme le Père Gilles, à relancer la course. Lui qui y est toujours cru. Egalement, l’accompagnement technique et financier de l’Institut national de l’élevage, de la Chambre d’agriculture du Gers, le soutien du conseil départemental et de la région Occitanie. Dans les années 90, un recensement a été effectué, avec l’autorisation de relancer la sélection et la reproduction. Autre artisan majeur de ce projet : le lycée agricole de Mirande. En 1997, il investit dans un troupeau de Mirandaises, qui aide le meilleur de la région avec 100 bêtes et un important effort de valorisation économique, en partenariat avec les différents acteurs.
Quinzaine commerciale en ce moment
« C’est un travail de longue haleine, mais il y a des raisons d’espérer », complète David Vaugon, professeur de zootechnie dans un lycée agricole, trois impliqués dans le projet qui a d’ailleurs sont déposés au Conservatoire du Patrimoine biologique régional Midi -Pyrénées en 2018. « Sur le téléski, la pente et le cheptel ont augmenté de 10% par an, ce qui est encourageant pour la suite, ajoute Julien Soulé. Même si on est toujours en race menacée ». Via le PAC, l’Europe soutient au passage le maintien de cette race, à hauteur de 200 € par vache. Dans l’idéal, il faut que l’effectif atteigne 3 000 à 4 000 animaux pour assurer sa pérennité.
Parce que la race subsiste, une seule solution : qu’ils soient elevage soit economiquement viable pour les eleveurs et que la viande trouve es public. Pour être plus visibles et qualitatifs, l’ensemble des acteurs ont élaboré une marque commerciale «Mirandaise, race locale du Gers», avec un cahier des charges qu’une vingtaine d’éleveurs sont déjà engagés à respecter. À savoir : un lifting extensif, le bien-être des animaux (castration sous anesthésie), les règles sur l’alimentation, l’hivernage, l’engraissement et la finition des animaux. « Il est encore trop compliqué pour nous de fournir de la viande mirandaise toute l’année aux bouchers, donc on est partis sur l’option de faire des événements commerciaux pour visibiliser la race », par Julien Soulé.

L’exploitation des père et fils Soulé comprend 30 vaches mirandaises et une dizaine de bœufs de cette race à petits effectifs.
Emblème du futur parc régional ?
Meilleur exemple : les deux Quinzaines commerciales organisées pour la troisième fois cette année. L’une en hiver et l’autre en été. Elle tient d’ailleurs cette semaine et jusqu’au 14 août dans les boucheries partenaires du Gers. «On démarche les bouchers locaux qui s’engagent à commercialiser la viande mirandaise pendant ces deux semaines et en contrepartie, on assure chez eux des actions de communication et des animations en boucherie», explique l’éleveur. Et la sauce à pris : les consommateurs gersois redécouvrent cette viande rustique, au goût d’autrefois et qui a « de la mâche ».
Autre bonne nouvelle pour la Mirandaise, son berceau de l’Astarac, il est bien parti pour obtenir le label Parc naturel régional (PNR). Une vitrine touristique très prometteuse pour la vache locale, qui pourrait en devenir l’emblème. « Par son côté très rustique et rompu à la sécheresse des coteaux gersois, la Mirandaise a également de gran capacités d’adaptation au changement climatique », a conclu David Vaugon, professeur au lycée agricole de Mirande. Une qualité qui pourrait séduire de futurs jeunes agriculteurs, de plus en plus sensibles à la fois au localisme et à l’environnement.
Gabriel Durant est un journaliste et écrivain français spécialisé dans la région Occitanie. Né dans la ville de Perpignan, Gabriel a toujours été passionné par l'histoire, la culture et la langue de la région. Après avoir étudié la littérature et le journalisme à la Sorbonne, il a commencé à écrire pour le site web Vent d'Autan, où il couvre un large éventail de sujets liés à l'Occitanie. En plus de son travail de journaliste, Gabriel est également un romancier accompli.